Pierrot le fou
De Jean-Luc Godard
L’histoire de Pierrot le fou ? Je ne sais pas. Il doit en y avoir une, mais elle n’a aucune importance. Un homme aime une femme, que voulez-vous de plus ? Il s’appelle Ferdinand. Elle l’appelle Pierrot. Ensemble, ils courent vers le soleil, vers la mer, vers la chaleur, ils traversent des incendies de couleur et des plages de mélancolie, ils sautent d’une voiture dans l’autre, d’un livre à l’autre, d’une humeur à l’autre. Ils vivent une passion, et sans passion on ne vit pas. On se traîne. Il l’aime, alors elle s’ennuie. Elle en suit un autre, il la tue, il se tue, tout éclate, oui, c’est quelque chose comme ça, Pierrot le fou. Quelque chose qui éclate. Quelque chose de rouge et bleu, très beau, très tragique, très drôle, et qui vous dilate le cœur et qui vous rentre dedans les yeux et par les oreilles. Les gens sérieux ont horreur de ça. C’est un film anarchiste, ils disent. Bien sûr. Interdit, à ce titre, au moins de 18 ans. Sans doute que, passé 18 ans, il n’y a plus rien à craindre ? La glue est sèche, plus question de décoller ? Ô stupidité de la censure ! Les gens sérieux ont horreur de Godard.
Françoise Giroud (L’Express, 8/11/1965)
Avec Jean-Paul Belmondo, Anna Karina | France Italie | 1965 | 1h55
Film restauré par la Cinémathèque française